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Constellation 

Photo du rédacteurManon LOPEZ

Olivier Liron : hors de « Contrôle »

« Contrôle » d’Olivier Liron est le nouveau livre de la collection « Vrilles » de Zone Critique.

 

Olivier Liron, auteur de Einstein, le sexe et moi, publié aux Editions Points, raconte un rendez-vous difficile à la CAF où l’auteur apprend qu’il leur doit une énorme somme d’argent. Accompagné de sa mère qui le soutient, Olivier passe une journée à la fois difficile et touchante puisqu’il a néanmoins la chance de croiser François Busnel, journaliste de la Grande Librairie à qui il remet son ouvrage.

 



L’art de raconter un instant de vie

  

En lisant « Contrôle », je n’ai pu m’empêcher de penser à Philippe Delerm : « Plus on va dans l'infime, plus on a de chances de trouver l'universel. » L’esthétique pure des instants « ordinaires », qui n’ont rien de glamour, qu’on ne raconte pas toujours, car peut-être ne valent-ils pas la peine d’en faire tout un roman. Mais si le cageot de Francis Ponge est à la hauteur de tout un poème, on peut aussi trouver une forme de prose dans un rendez-vous tendu avec la CAF.

 

C’est un instant de vie saisi par Olivier Liron qui montre la réalité du métier d’écrivain. Une réalité qui s’éloigne des Voltaire et Diderot posés allégrement sur des canapés de soie, royaux dans d’allure et de plume. La question de vivre de ses écrits, de son art plus généralement, est souvent au cœur de toute réflexion quand on décide d’écrire un livre. Il y a pourtant un précipice entre la grandeur et la beauté de ce métier, et aussi ce qu’il rapporte concrètement. La précarité peut faire partie de l’aventure artistique, mais elle reste souvent silencieuse jusqu’à ce que le succès frappe à la porte – et encore faut-il que ce succès soit fulgurant pour payer les factures. La force de l’art frôle le bénévolat, sûrement par le fait qu’il est inconcevable pour beaucoup qu’il puisse se mêler à des problématiques aussi matérielles que l’argent.

Au-delà de ce questionnement, de cette réalité crue dévoilée par Olivier Liron, on ne peut qu’apprécier la façon dont il la raconte. Sa légèreté, valsant avec l’humour, est appréciable et ne tombe jamais dans le pathos ou la complainte de l’artiste. Au contraire, la véritable richesse se trouve ailleurs, particulièrement dans l’humanité qui se déploie lorsqu’on est confronté à des moments difficiles. Olivier peut se reposer sur les épaules de sa mère qui apporte une énergie lumineuse au récit. Cet amour partagé, discret, est émouvant, et offre une touche de poésie indéniable au récit.


 

L’émotion irréelle d’un rendez-vous avec la CAF 

 

La littérature est l’art de graver des moments dans l’éternité, mais aussi, comme nous l’avons vu, de les rendre plus sublimes qu’ils ne le sont. Hugo ne rendait-il pas le grossier merveilleux ? La plume est un filtre qui permet d’embellir, ou même de faire surgir le beau dans la banalité, l’ennui, l’ordinaire qui tapissent nos vies, et dont on oublie trop souvent que des trésors s’y cachent. L’imprévu domine cette journée éprouvante pour Olivier, même si elle a son lot de surprises. Ce qui me frappe reste ce style aérien, lumineux qu’adopte l’auteur, injectant une certaine poésie dans cet instant plutôt difficile qui remet en question le métier d’écrivain. Je retiens particulièrement les échanges entre Olivier et sa mère, la façon dont elle croit en son fils :  « Par un banal travers d’écrivain, incapable de vivre le réel autrement qu’à travers le prisme du récit que je peux en faire, j’ai pensé : « Un jour, je raconterai dans un livre que, ce jour-là, ma mère m’a pris dans ses bras, pour la première fois depuis longtemps. »

 

            C’est ce qu’on retient de cette journée éprouvante : l’amour qui se manifeste là où on ne l’attend pas, la minute douce qu’on se décide d’extraire du chagrin pour rendre ce dernier plus acceptable. Olivier Liron, vous êtes « hors » de contrôle, car finalement, l’administration pourra vous convoquer autant de fois qu’elle souhaite, la légèreté viendra à ce rendez-vous avec son plus beau sourire.

 

Un article de Manon LOPEZ.

 

« Contrôle » est à retrouver sur le site de Zone Critique, « Collection Vrilles ».

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