Van Gogh, la force de la défaite

Van Gogh de Maurice Pialat est un film racontant les derniers mois du peintre.

Film lancinant qui laisse la part belle aux moments de vie, qui s’éloigne de la biographie linéaire pour un récit sous forme de touches. Pialat explore ici les aspects les plus intimes et passionnés de sa vie, créant ainsi une connexion émotionnelle profonde entre le spectateur et le protagoniste, sans jamais passer par les chemins habituels du biopic. Il ne présente pas son personnage comme un homme dont le monde a besoin, ou un homme qui sera important dans l’Histoire. Ici Pialat cherche à montrer les relations humaines et tous leurs mystères par le biais de Vincent Van Gogh. Au cœur du film réside la performance exceptionnelle de Jacques Dutronc dans le rôle de Van Gogh, qui capte avec une puissance émotionnelle saisissante les contradictions de l'artiste, rendant chaque instant crédible et poignant. Le film raconte en réalité un personnage condamné pour sa passion par la société.

Cette passion se manifeste à travers plusieurs facettes de la vie de Van Gogh. La passion pour la peinture, d'abord, est illustrée à travers des séquences poignantes montrant le processus créatif, les coups de pinceaux frénétiques et les moments d'extase artistique. Pialat nous offre une immersion viscérale dans l'univers pictural de Van Gogh, où chaque toile devient une expression de sa passion ardente. Cette passion pour la peinture éloigne Vincent, comme un fantôme, des autres personnages. Cette ombre est coincée dans un quotidien rustique qui annihile son travail.

“Vincent c’est une succession de moments de faiblesses, mais au bout quelle force.”           Marguerite

L'amour est une autre forme de passion explorée par le film. Elle est incarnée dans la relation complexe entre Van Gogh et Marguerite Gachet, interprétée par Alexandra London. Cette histoire d'amour tourmentée, marquée par des éclats de passion et des moments de douceur, devient un miroir de la nature tumultueuse et intransigeante de Van Gogh. La passion amoureuse devient ainsi un moteur puissant, alimentant à la fois la joie et la souffrance du protagoniste. Le personnage de Marguerite est en fait un double de Vincent car comme lui elle est animée d’une passion, la musique. La scène du piano montre bien l’importance de l’aspect artistique. En effet Vincent, va demander à Marguerite de jouer du piano pendant qu’il la peint. Ce que montre ici Pialat c’est que l’art éveille l’art et donc que la musique jouée par Marguerite inspire Vincent qui se met ainsi à peindre.

Pialat opte pour un réalisme brutal dans sa représentation de la vie quotidienne de Van Gogh. Des champs de tournesols lumineux aux intérieurs modestes, chaque cadre enferme le protagoniste dans sa passion, ce qui l’éloigne de la société mais qui le rapproche à la fois de la peinture mais aussi de la nature. Le choix du réalisme contribue à ancrer le spectateur dans le monde tangible et palpable de Van Gogh, tout en soulignant la dualité entre la beauté extérieure et la tourmente intérieure.

Une narration morcelée

La narration non linéaire, caractéristique du style de Pialat, renforce l'exploration des méandres émotionnels de Van Gogh. Le réalisateur préfère les moments évocateurs aux événements chronologiques, créant ainsi une expérience cinématographique immersive et émotionnelle qui confronte la passion de Van Gogh aux règles de la société : il se doit de respecter les heures de repas, il doit être fidèle, dans sa peinture, à la réalité et doit se débarrasser de certaines toiles qui prennent de la place chez son frère. Ces fragments de vie, capturent l'essence même de la passion qui échappe souvent à toute logique linéaire.

Van Gogh de Maurice Pialat est finalement bien plus qu'une simple biographie. C'est une plongée profonde dans les méandres passionnés de l'âme créative de l'artiste. Pialat transcende le genre biographique en explorant la passion dans toutes ses nuances, de l'amour à la création artistique. Jacques Dutronc offre une performance exceptionnelle qui donne vie à Van Gogh de manière mémorable. Le réalisme cru, la narration non linéaire et la puissance émotionnelle font de ce film une œuvre cinématographique saisissante, capturant l'essence même de la passion qui a animé et consumé Vincent van Gogh.

Un article de Isaac VIVIER.

pour voir la bande annonce, cliquez sur l'affiche ci-dessous.